samedi 29 septembre 2012
vendredi 21 septembre 2012
Béatrice de Nazareth - Sept manières d'aimer
Béatrice de Nazareth (1200-1268), moniale cistercienne
flamande, proche du mouvement des béguines a laissé divers écrits
mystiques rédigés en flamand dont un traité sur Sept manières d'aimer.
Sa vie relate une expérience mystique étonnante. C'est dans son cœur
que Béatrice établit son monastère spirituel, qu'elle aménage sa cellule et son
jardin, qu'elle s'ouvre à l'amour.
Béatrice de Nazareth est entrée dans une expérience unique, elle a cherché à la nourrir et à en vivre à chaque étape de sa vie humaine et monastique, dans ses combats intérieurs et ses tentations, dans son attente patiente de la transformation, dans la joie et l'amour de la rencontre. Elle a réussi à parcourir - et ce faisant à tracer pour d'autres - une voie de sagesse dans son amour ardent de l'Absolu.
Béatrice de Nazareth est entrée dans une expérience unique, elle a cherché à la nourrir et à en vivre à chaque étape de sa vie humaine et monastique, dans ses combats intérieurs et ses tentations, dans son attente patiente de la transformation, dans la joie et l'amour de la rencontre. Elle a réussi à parcourir - et ce faisant à tracer pour d'autres - une voie de sagesse dans son amour ardent de l'Absolu.
"Blessed Beatrice" tableau de Gwyneth Holston |
Rendre amour à l’Amour, sans nul pourquoi.
Tant qu’on n’a pas tout donné, on n’a rien donné.
Comme une morte-vivante, dans cet enfer, ici.
Tant qu’on n’a pas tout donné, on n’a rien donné.
Comme une morte-vivante, dans cet enfer, ici.
Béatrice de Nazareth
Sept manières d’aimer
(Texte résumé)
La première manière est un désir actif de l'amour, qui doit régner dans le
cœur longtemps avant de vaincre tout obstacle, œuvrer avec force et vigilance
et croître vaillamment tant que dure cet état.
Ce désir vient évidemment de l'amour même : l'âme bonne, qui veut servir
fidèlement, suivre sans crainte et aimer en toute vérité, est mue par ce désir
de vivre dans la pureté, dans la
noblesse et la liberté de celui qu’elle sert, être à son image et à sa
ressemblance, —ressemblance qu'il lui faut aimer et garder par-dessus tout.
C'est dans cette voie qu'elle veut monter vers un
amour plus haut, vers une connaissance plus intime, jusqu’à la perfection.
C'est à cela qu'elle se livre tout
entière. C'est toute sa question, toute sa
pensée : comment arriver à gagner l'intimité de l'Amour et à lui ressembler en
toute parure de vertus, en tout ce qui lui sied ?
Cette âme examine souvent ce qu'elle est et ce qu'elle doit être, ce
qu'elle a et ce qui lui manque. Son cœur ne se repose point, sa volonté ne se
lasse pas de chercher, d'apprendre, de la faire avancer en amour.
Une autre manière d'amour est en ceci parfois, que l'âme veut aimer de façon
toute gratuite. Elle veut servir pour
rien : aimer simplement, sans pourquoi, sans récompense de grâce ou de gloire ,
comme une jeune fille qui vaque au service de son seigneur par pur amour, sans
salaire aucun, satisfaite de le servir et qu'il la laisse servir. C'est ainsi
qu'elle voudrait fidèlement rendre amour à l'Amour, le servir en aimant sans
mesure.
De tout son être, elle ne veut que plaire à l'amour. Faire ou souffrir
quelque chose à son service, voilà ce qui lui plaît et lui suffit.
Pour la troisième manière d'aimer, ce désir parfois s'élève en elle
violemment. L’âme de bonne volonté y passe par de grandes peines, car elle veut
à tout prix contenter l'Amour et le satisfaire en tout honneur, en tout
service, en toute obéissance d'amour.
L’âme de bonne volonté y passe par de grandes peines, car elle veut à tout
prix contenter l'Amour et le satisfaire en tout honneur, en tout service, en
toute obéissance d'amour. Elle est disposée à tous les dévouements, prompte et
intrépide dans la peine ou le labeur. Mais, quoi qu'elle fasse, elle demeure
insatisfaite.
Telle est bien sa pire douleur, de ne pouvoir rendre justice à l'amour
selon ses désirs, de se trouver toujours avec lui en dette insolvable.. Elle
veut y suppléer par l'intention parfaite et les puissants désirs. Mais cela
même ne la console pas. Elle n'arrive pas à se modérer, à se dominer, à se
tranquilliser. Elle rend à l'amour grâces et louanges, elle œuvre et travaille
pour lui, elle s'offre tout entière à l'amour et n'agit qu'en lui.
En tout cela donc, point de repos pour elle : elle doit souffrir toujours
de ne point saisir ce qu'elle convoite. Elle reste plongée dans le crève-cœur,
dans la langueur insatiable : il lui semble qu'elle meurt sans mourir, et que
dans cette mort elle souffre l'enfer. Sa vie est infernale en vérité, elle
n'est que déception et disgrâce, les désirs anxieux la martyrisent, nul
accomplissement, nulle satisfaction, nul apaisement ne se laisse entrevoir.
Dans la quatrième manière d'amour, l'âme goûte tour à tour de grandes
délices et de grandes peines. Elle éprouve, une illumination de l'esprit, un
merveilleux excès de délices, une étroite nécessité d'obéir à l'amour, sa
volonté est amour, elle se trouve plongée et engloutie dans l'amour. La beauté
de l'amour l'a rendue belle. Elle est toute à l'amour et ne peut s'occuper que
de lui.
Son esprit s'abîme tout entier dans l'amour, son corps défaille, son cœur
se liquéfie et ses forces l'abandonnent. Elle est tellement dominée par l'amour.
Elle est comme un vase comble dont le contenu se répand au moindre mouvement : la
plénitude de son cœur l'accable, et sans qu'elle y prenne garde, pour un rien
l'amour déborde.
Dans la cinquième manière, il arrive parfois que l'amour s'élève dans l'âme
en tempête elle veut satisfaire l'amour en ses multiples exigences,
ou bien elle veut se reposer dans le doux embrassement de l'amour. Elle se trouve si
forte en esprit, elle embrasse tant de choses en son cœur que tout en elle, lui
semble-t-il, est activité et travail. Tantôt c'est le sentiment de l'amour même
qui, sans raison aucune, la fait souffrir, tantôt l'absence de ces biens dont
l'amour a soif, et la fruition refusée à son désir. Par instant, l'amour perd à
ce point toute mesure en elle, il jaillit avec une telle effraction, agite le
cœur si fort et si furieusement, que ce cœur semble de toutes parts blessé, et
ses blessures ne cessent de se renouveler, chaque jour plus brûlantes et plus
douloureuses. Il lui paraît que son sang l'abandonne, que sa gorge se dessèche
; son visage et tous ses membres ressentent la brûlure intérieure et l'ire
souveraine de l'amour. Parfois aussi c'est comme un feu qui attire tout ce
qu'il peut consumer : telle est la violence que cette âme éprouve, l'action en
elle de l'amour sans mesure et sans pitié, qui exige et dévore toute chose.
La Fiancée est ainsi tourmentée, écrasée, épuisée intérieurement, le lien
d'amour la serre de si près, son immensité l'assujettit de telle sorte, qu'elle
ne peut garder ni mesure ni raison. Elle est donc entraînée et stimulée plus
fort chaque jour, nullement satisfaite ni calmée. Ce qui la dévore et la
tourmente le plus.
En la sixième manière la Fiancée éprouve encore une autre forme de l'amour
avec connaissance plus intime et plus élevée. Elle sent que l'amour dilate et exalte
son être. Elle est maîtresse d'elle-même à présent et ne trouve plus de
résistance : tout est facile à faire ou à laisser, à souffrir ou à porter, Elle
éprouve alors une dévotion divine.
L’amour la rend alors si hardie qu'elle ne craint ni homme ni démon, ni
ange ni saint, ni Dieu même. Elle sait et sent que ni travail ni souffrance
n'importe à l'amour lorsqu'il règne dans une âme.
Mais tous ceux qui veulent venir à lui doivent le chercher s'y exercer avec
ardeur et ne s'épargner eux-mêmes ni dans l'effort ni dans les douleurs.
L'âme bienheureuse connaît encore une septième sorte d'amour sublime qui
opère en elle intérieurement un singulier travail. Elle est attirée dans
l'amour au-dessus d'elle-même, au-dessus des sens, de l'humaine raison et de
toute opération de son propre cœur
La Fiancée est alors si tendrement abîmée dans l'amour, emportée par une
aspiration si forte que son cœur affolé ne peut plus contenir l'élan intérieur,
son âme dans l'excès d'amour s'écoule et s'évanouit, son esprit cède tout
entier à la fureur des puissants désirs.
Elle ne peut cesser de le vouloir, car l'amour ne lui laisse ni répit ni
repos, ni paix d'aucune sorte. L'amour l'exalte et l'abaisse, lui fait goûter
mort et vie, la guérit et la blesse derechef, la rend folle et de nouveau sage,
et par ces voies l'attire à l'état le plus haut.
La terre est donc pour elle un grand exil, une dure prison, un tourment
cruel. Elle ne ressent pour le monde que dégoût et mépris, rien de ce qui est
terrestre ne peut la flatter ni la satisfaire : c'est grande peine pour l'âme
d'être ainsi, de devoir vivre au loin et partout étrangère. Elle ne peut
oublier son exil ni apaiser sa langueur. Ce qu'elle éprouve est passion et
martyre, sans comparaison ni mesure.
Elle a donc grande soif d'être libérée de ce ban et déchargée des liens de
ce corps. Le désir la mine, la consume et la dévore d'atteindre le pays de
l'éternité. Sous l'empire immense de ce désir, sa condition est dure et pesante
C'est un mal aigu et une vie mourante ! L'âme ne peut monter là-haut ni se
sentir en paix ici-bas. Elle ne peut supporter la pensée de l'Ami, tant elle le
désire, et la pensée d'en être privée la torture incessamment. Il lui faut
vivre tous les tourments, Elle reste donc inapaisée, inconsolée malgré tous les
dons qu'elle peut recevoir, tant qu'elle est privée de la présence du
Bien-Aimé.
Morte ou vive, elle veut se livrer à l'amour, elle endure en son cœur
d'immenses souffrances et c'est pour l'amour seul qu'elle veut gagner la Terre
Promise.
Telle est par-dessus tout l'œuvre de l'amour : il veut l'union la plus
étroite et l'état le plus haut, où l'âme se livre à l'union la plus intime.
La Bien-Aimée ne cesse donc point de chercher l'amour, elle voudrait le
connaître et en jouir toujours, mais c'est chose qui ne peut être en cet exil :
elle veut donc migrer vers ce pays où elle a fondé sa demeure et fixé son cœur,
où déjà elle repose avec l'amour. Car elle le sait bien, c'est là que tout
obstacle cessera et que l'Aimé tendrement l'embrassera.
Elle y contemplera passionnément
ce qu'elle a si tendrement aimé; elle possédera pour son salut éternel celui
qu'elle a si fidèlement servi; elle jouira en toute plénitude de celui que par
l'amour elle a si souvent embrassé dans son âme.
lundi 17 septembre 2012
Ecrire,...ouvrir la porte
Ecrire, c'est dessiner une porte sur un mur infranchissable, et puis l'ouvrir.
Christian Bobin - L'homme-joie
mardi 11 septembre 2012
dimanche 9 septembre 2012
Elle était...
Elle était
Elle
avait un cœur de cristal :
Chaque fois qu'il débordait de vin d'amour
Les choses en fête dansaient sous sa lumière
Elle était l'oiseau qui ne battait jamais de l'aile
dansant sous les pluies
chantant pour les voyages
Elle était, dans la nuit constellée, une forêt
Que ne pénétrait que l'étoile chargée de songes.
Le parfum s'en exhalait de toutes parts.
Elle est morte …
Le destin chantait alors qu'elle mourait.
De son histoire, elle n'a gardé
Que ce que le vent porte
D'exhalation de parfum.
Aux fleurs rêvant du printemps,
Elle a offert la couleur, puis elle s'est retirée
Chaque fois qu'il débordait de vin d'amour
Les choses en fête dansaient sous sa lumière
Elle était l'oiseau qui ne battait jamais de l'aile
dansant sous les pluies
chantant pour les voyages
Elle était, dans la nuit constellée, une forêt
Que ne pénétrait que l'étoile chargée de songes.
Le parfum s'en exhalait de toutes parts.
Elle est morte …
Le destin chantait alors qu'elle mourait.
De son histoire, elle n'a gardé
Que ce que le vent porte
D'exhalation de parfum.
Aux fleurs rêvant du printemps,
Elle a offert la couleur, puis elle s'est retirée
Poème de Mohamad Ibrahim Abou-Senna
jeudi 6 septembre 2012
Le cantique des cantiques
Le
Cantique des Cantiques
ou
la psychologie mystique des amants
d'après Pierre Trigano &
Agnès Vincent
«Qui est celle
qui monte du désert appuyée
sur son amour ?»
(Cantique des
Cantiques 8, 5)
«Je
dors, mais mon cœur veille. Voix de mon
amour
qui frappe : ouvre-moi, ma sœur, ma
compagne…»
(Cantique des
Cantiques 5, 2)
Rabbi Hayen de Vologine (
12°siècle ) écrivait ainsi :
«Le
texte de la Torah est une braise sous la
cendre
de ses lettres, la vivacité de la flamme
qu’on
en tire dépend de la longueur du souffle
de
celui qui l’anime».
Le sens littéral de ce texte, tel
qu’il est codifié et transmis de manière rigide par les institutions
religieuses est certes comme une cendre refroidie, statique. Dès lors son texte est pour ainsi dire fermé
et toutes les générations de croyants doivent se conformer à un sens
pré-établi. Celui-ci, comme une cendre à la surface de ce texte, nous cache
ainsi qu’il est une braise vivante, en ses profondeurs.
Il est cette braise, parce qu’il véhicule
une puissance symbolique infinie, en tant que structure signifiante de la présence infinie de celui que le Cantique des Cantiques nomme comme étant notre Amour, le Bien-aimé, le Compagnon.
le poète soufi iranien Rumi (13ème siècle) a pu
écrire :
«L’état
d’amour est en dehors des religions et de
la
foi.
Dieu
est la religion de l’amant.
Dieu
est l’état de l’amant».
Mathnawi
II, 1770.
dimanche 2 septembre 2012
"Il était une fois"...
[...] Tu es le conte, non la réalité...tu es le conte , parce que tu es mon amour,[...] j'ai un regard magique pour mieux te voir, [...]
Extrait des lettres à L'Amant - Tome 2
Une flamme pour personne
[...] Savez-vous qu'il me semble, à présent, que Michel fut seulement le prétexte de l'amour -- qu'il n'en est plus que le symbole, le signe ? Pourquoi je pense cela ? Parce qu'Il est absent, et que l'amour demeure; parce que la réalité de sa présence ne me cerne plus et que l'amour me comble. Michel, un mythe, et mon amour seule réalité -- et pas tellement l'amour de Lui, comme ce fut ou comme je le crus (?); l'amour (tout court) et je crois que je pourrais dire: sans objet, ou plutôt sans objet exclusif: moi, une flamme pour personne, pour rien, ma propre limite.
Extrait de Lettres à l'Amant - Tome I
"Moi, une flamme pour personne, pour rien, ma propre limite." |
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